Vous êtes sur le serveur BaseX expérimental de l‘IHRIM. Navigateurs supportés : versions récentes de Chrome, Firefox.

☰ menu
Autres sites sur
Montesquieu

HAUTHAUT

Les ouvrages provenant de Malebranche (1715-1732)

On sait depuis l’édition de 1954 du Catalogue que Montesquieu possédait plusieurs ouvrages de Malebranche : plusieurs d’entre eux avaient été vendus en 1926, et il s’en était retrouvé à la bibliothèque de Bordeaux 1 . On imagine sans peine par quel canal ils lui sont arrivés : à partir de 1707, le père Desmolets seconde le P. Lelong, bibliothécaire de l’Oratoire rue Saint-Honoré, et lui succède à partir de 1721 2 . Il avait donc un accès privilégié à la bibliothèque du grand philosophe de l’Oratoire. Si on ne sait comment Desmolets connut Montesquieu, on est certain qu’en 1716 (donc peu de temps après la mort de Malebranche, qui disparaît en 1715), ils sont déjà amis 3 .

En 1967, André Robinet parachevait l’édition des Œuvres complètes de Malebranche qu’il avait dirigée en donnant un tome XX, Malebranche vivant , constitué de « Documents biographiques et bibliographiques  » 4 . Dans la « Section bibliographique  », un sous-chapitre récapitulait les ouvrages de Malebranche ayant figuré dans la bibliothèque de Montesquieu 5 .

Robinet se fondait sur l’édition de 1954 du Catalogue, qui signalait ces ex-libris d’après les deux catalogues de vente de 1926 et les mentions figurant sur le Catalogue manuscrit, ce qui lui fournissait treize titres ; il avait également eu accès à la bibliothèque du château de La Brède, ce qui lui avait permis d’en ajouter quatre.

Sur les dix-sept ouvrages ainsi identifiés, il nous est apparu qu’un cas était douteux : Robinet, à la suite de l’édition de 1954 du Catalogue, donnait comme ayant appartenu à Malebranche le no 1638, de Philippus van Lansbergen ; or la notice no 319 de la deuxième vente de 1926 ne mentionne pas cette provenance, pourtant signalée par Céleste sur le Catalogue manuscrit. Qui croire ? Les signalements de l’ex-libris de Malebranche dus à Céleste sont tous vérifiés 6  ; mais les experts auraient-ils fait une erreur de cette taille ? Reconnaissons qu’il s’agit d’une simple omission, qui pouvait être rectifiée facilement lors de la vente ; de plus, le cas est identique pour un autre ouvrage, la Lettre d’un philosophe à un cartésien de ses amis de Rochon, actuellement conservé à Bordeaux, ce qui permet de constater que Céleste avait pleinement raison. Nous retenons donc ce titre, et nous arrivons ainsi pour notre part à vingt ouvrages, soit d’après le signalement des catalogues de vente de 1926, soit sur les exemplaires eux-mêmes, soit d’après les signalements de Céleste sur le manuscrit même du Catalogue : non seulement celui dont il vient d’être question, mais un autre, qui constitue la seule trace que nous en ayons. Nous pourrions donner cette authentification seulement comme probable, d’autant que ce titre ne figure pas dans l’inventaire de la bibliothèque de Malebranche sommairement établi par le père Lelong 7  ; mais c’est le cas pour un autre de ces ouvrages, ce que Robinet explique par des circonstances particulières.

Aux dix-sept ouvrages répertoriés par Robinet nous pouvons donc ajouter :
– Grotius, Epistolae ad Gallos (fonds de La Brède, bibliothèque de Bordeaux)
– Rochon, Lettre d’un philosophe à un cartésien de ses amis (bibliothèque de Bordeaux)
– Apollinaire de Valognes, le P., Institutions et statuts du tiers ordre de s t François (signalé par Céleste).

Les trois titres que nous ajoutons permettent de constater que les dates et adresses bibliographiques ajoutées par Robinet à l’inventaire Lelong sont fausses dans les trois cas.

Douze de ces ouvrages sont conservés : un à Harvard (Houghton Library), un à la Bibliothèque nationale de France (Tolbiac), dix à la bibliothèque municipale de Bordeaux (dont neuf dans le fonds de La Brède).

Huit n’ont pu être localisés : outre ceux que mentionnait Céleste, trois qui étaient signalés par le catalogue de la première vente de 1926, trois qui l’étaient par celui de la seconde vente.

Les deux ouvrages considérés comme « perdus  » par Robinet (Senault, Catalogue, no 1546 [ou no 698] et Van der Linden, no 1040), car ils auraient quitté la bibliothèque sans laisser de trace, donc avant 1926 8 , figurent, le premier à la Bibliothèque nationale de France (après avoir été vendu en 1926), le second dans le fonds de La Brède.

Robinet, qui avait relevé 280 titres identiques dans l’inventaire de Lelong et le Catalogue de La Brède, jugeait qu’il s’agissait d’une « surprenante coïncidence  » ; il avait aussi constaté que plusieurs ouvrages conservés à La Brède dont le titre figurait aussi sur l’inventaire de Lelong portaient l’ex-libris de la maison oratorienne (« Oratorii Parisiensis catalogo inscriptus  » 9 ) : Malebranche n’ayant pas forcément inscrit son ex-libris personnel, ses ouvrages auraient pu être mêlés à ceux de la bibliothèque. Vérification faite, cela concerne surtout le seul exemple que donne Robinet, Cursus seu mundus mathematicus de Milliet de Chales (Catalogue, no 1763), ou encore le Lexicon graeco-latinum de Georg Pasor (no 2511), dont on sait maintenant qu’il a une autre origine, la « collection PDL  » 10 . Certes les 280 titres communs n’ont pas tous été examinés, et nous n’excluons pas que quelques « coïncidences  » puissent correspondre effectivement à cette provenance illustre ; mais en l’état actuel, il est impossible de les identifier comme telles.

image
Tableau récapitulatif des ouvrages ayant appartenu à Malebranche

Notes

1 Voir Les catalogues de 1926.

2 Renseignements tirés de la notice « Desmolets, Pierre- ?  » de Michel Gilot et Françoise Weil, Dictionnaire des journalistes, no 230 : http://dictionnaire-journalistes.gazettes18e.fr/journaliste/230-desmolets.

3 Voir la lettre du [19 avril 1716], OC, t. 18, lettre 5. On a parfois écrit que Desmolets avait été le professeur de Montesquieu à Juilly ; mais, sourd depuis l’enfance, il n’a jamais enseigné, ni même mis le pied à Juilly : il se retire en 1699 au séminaire de Saint-Magloire, avant d’entrer à l’Oratoire en 1701.

4 Paris, Vrin, 1967.

5 Pages 289-290. Robinet avait également donné une note, « Ouvrages ayant appartenu à Malebranche recueillis par Montesquieu  », Revue historique de Bordeaux, VIII (1959), nouvelle série, 4, p. 267-268.

6 On trouvera plus bas un tableau récapitulatif.

7 Malebranche vivant , p. 234-286.

8 Mais alors comment pouvait-il savoir qu’ils portaient l’ex-libris de Malebranche ? Il y a là un certain flou.

9 Voir Une nouvelle analyse.

10 Voir Une nouvelle analyse.